Préface

Les compagnies des Sapeurs-Pompiers volontaires, le Service d'Incendie et de Secours (S.I.S.) et le service de sécurité de l'aéroport (S.S.A.) forment les services de défense du canton de Genève au sens de la loi F 4.0.

Ces troupes regroupent environ 250 professionnels permanents et près de 2'000 miliciens.

Les Sapeurs-Pompiers volontaires sont une force dont Genève ne saurait se passer pour faire face aux sinistres importants d'origines naturelles ou technologiques qui menacent notre canton.

L'enthousiasme de deux Sapeurs-Pompier volontaires qui comme leurs collèguent offrent une grande partie de leurs loisirs à la communauté, est à saluer et à remercier.

C'est cet enthousiasme qui les a conduits à rédiger cet ouvrage sur l'organisation et le matériel, qu'ils en soient remerciés.

Lieutenant-Colonel Olivier Légeret
Cdt Service d'Incendie
et de Secours - Genève

Major Légeret

Les missions des sapeurs-pompiers genevois

Pour définir les missions des sapeurs-pompiers, trois mots suffisent: SAUVER - TENIR - ÉTEINDRE.
Par contre, détailler ces missions, c'est avant tout inventorier les matériels dont disposent les Corps de sapeurs-pompiers ainsi qu'esquisser les multiples savoir-faire nécessaires à leur maniement et à leur engagement. C'est également connaître le degré d'alerte et d'engagement de chacune des composantes de l'organisation de lutte contre l'incendie et de secours.

Aussi, avant d'énumérer les missions, il faut rappeler que le système helvétique de défense contre l'incendie repose sur des organisations communales et cantonales. Ainsi à Genève, sous le terme générique de sapeur-pompier, se regroupent l'ensemble des compagnies volontaires, à savoir, depuis la loi de 1825, une par commune et quatre pour la ville de Genève; les sapeurs-pompiers d'entreprises; les sapeurs d'aviation du SSA; les intervenants du CERN et les sapeurs-pompiers professionnels du SIS. En dehors des missions spécifiques dévolues au SSA, au CERN et aux sapeurs-pompiers d'entreprises, sur tout le territoire cantonal, les premiers secours sont assurés par le SIS.

Si, au moment de la création du bataillon des sapeurs-pompiers de la Ville de Genève par le lt-colonel R. A. CEARD en 1840, l'incendie représentait la quasi totalité des alertes, aujourd'hui il en va tout autrement. Ainsi, sur environ 5'000 interventions recensées annuellement, la part des incendies représente moins de 20%. Tandis que les interventions dites techniques requièrent de plus en plus souvent notre présence. Par intervention technique, il faut entendre:
La lutte contre les pollutions.
Les incidents et accidents chimiques (4%).
L'approche, le sauvetage, la désincarcération et le transport de personnes victimes d'accidents, brûlées, intoxiquées, noyées, désespérées, etc... (8% jusqu'en 1994).
Le sauvetage d'animaux (3,5%).
La récupération d'essaims d'abeilles et la destruction de guêpes ou de frelons, ainsi que la récupération de serpents et autres animaux venimeux ayant échappés à leurs propriétaires.
Le tronçonnage et l'abattage d'arbres.
La prévention de chute de matériaux (4%).
Les dépannages d'ascenseurs (10%).
Les inondations (6%).

Pour être exhaustif, nous devons ajouter la forte proportion d'alertes dues aux avertisseurs qui représentent également près de 20% du total. Sans oublier le demi millier d'interventions diverses où l'on retrouve la recherche de clés tombés dans une cage d'ascenseur ou dans un caniveau, l'ouverture de locaux en pénétrant par les fenêtres, les échelles misent à disposition du Cardiomobile afin de permettre l'évacuation de patients lorsque les cages d'escaliers sont trop exiguës, etc...
Soulignons enfin que ces statistiques ne tiennent pas encore compte de la recrudescence de transports ambulances intervenues depuis la création de la brigade sanitaire publique qui regroupe, depuis 1994, les services ambulanciers de la Police, du SSA et du SIS. Actuellement ce sont deux à trois interventions de ce type qui sont effectuées quotidiennement par le seul SIS, soit une augmentation d'environ 50%. Départs qui s'avèrent salutaires et indispensables pour la formation par la pratique de notre personnel.
Nous ne pouvons clore cette longue énumération sans aborder le chapitre délicat des alertes fallacieuses. Très souvent le fait d'enfants désoeuvrés, représentant moins d'une dizaine d'appels annuels, elles restent heureusement marginales.

La plupart de ces missions sont prioritairement, voire exculsivement celles du SIS. Les compagnies de sapeurs-pompiers volontaires interviennent, quand à elles, en renfort de leurs collègues professionnels pour les cas d'incendies, de recherche de personnes, lors d'inondations dues aux orages, pour le tronçonnage d'arbres, ceci en fonction du matériel qu'elles ont à leur disposition et de leur degré de préparation. Cas particulier, le CCG de Vernier qui intervient, en renfort du SIS, lors d'engagement sur les dépôts pétroliers. Notons également que depuis 1994, un cours cantonal chimique informe les volontaires sur les dangers chimiques et les sensibilise sur le rôle qu'ils doivent assumer dans ce contexte particulier.

En fait derrière cette description sommaire et quelque peu rébarbative de nos missions se cache, souvent palpitante, la vie de notre chère cité. Vie qui s'adapte à l'évolution technologique, mais qui tient également compte des mutations sociologiques, de la transformation des personnalités, de la marginalité, du recul économique, du chômage, du redimensionnement des Administrations et de la redistribution de certaines tâches.
Dans ce contexte, le sapeur-pompier ne peut que coller à cette mouvance si il veut demeurer efficace .Aussi, pour y parvenir, il consacre toujours plus de son temps à la formation et à la recherche des automatismes indipensables à son savoir-faire.

Le déroulement d'une intervention

Toutes les interventions débutent par un événement. Evénement suffisamment important pour, qu'aux yeux des témoins, il nécessite notre intervention. Dès cet instant, qu'elle que soit la typologie et la gravité de l'événement, tout s'enchaîne... très vite!

  1. Sur la ligne 118, l'alerte retenti au Central d'alarmes du SIS.

  2. Un téléphoniste professionnel répond et prend les renseignements indispensables (nom de l'appelant, adresse, n° de téléphone, motif de l'appel, situation, etc.). En fonction de ces renseignements, il décide du premier engagement. Aidé par son collègue, ils donnent l'alarme (message, sonnerie) dans la (ou les) caserne(s) concernée(s), tout en rédigeant la feuille de départ.
  3. De jour comme de nuit, dès que l'alarme retentit dans la caserne, les sapeurs-pompiers déboulent de toutes parts vers le hall des véhicules. Arrivés aux patères, ils s'équipent fébrilement. Une fois revêtus de leur tenue de feu, ils se dirigent vers le(s) véhicule(s). Le chef de départ s'arrête au guichet de Central d'alarme où il récupère la feuille de départ et, parfois de précieux rensignements.
  4. Au moment où le premier véhicule quitte la caserne, le chef de départ demande, par radio, au Central d'alarme confimation de la destination. Si il s'agit d'un incendie, à bord du véhicule, alors que chacun cherche le meilleur itinéraire, l'hydrantier situe sur le plan les points d'eau. En arrivant sur place, il devra les localiser très vite!
  5. Le chef du premier véhicule annonce le sur-place. Pendant que s'effectue la reconnaissance, en fonction de son rôle et de la typologie de l'événement, chaque intervenant participe à la préparation, puis à la mise en place du dispositif.
  6. Le chef d'intervention prend soin de renseigner le Central d'alarme. Au besoin, il commande les renforts en hommes et en matériels qu'il juge nécessaire.
  7. Dès que l'événement est maîtrisé, la relève des moyens s'organise. Les véhicules qui rentrent en caserne sont immédiatement rééquipés. En tout temps, ils doivent être prêts à répondre à de nouvelles demandes de secours.
  8. Dans la plupart des cas, l'intervention ne se termine qu'au moment où le chef de départ a rempli le rapport interne d'intervention. Dans d'autres cas, notamment lors d'interventions chimiques, il faut attendre que les produits incriminés soient détruits ou neutralisés et le matériel décontaminé.
Cette description très générale donne une idée du déroulement normal de l'intervention. Il va de soi que les procédures diffèrent sensiblement si nous partons porter secours à un minet perché sur un arbre, ou si nous allons éteindre un incendie dans un grand magasin.
Remarquons que lors de toutes nos alarmes prioritaires, la gendarmerie dépêche au moins une patrouille sur place. Les piquets de l'Ecotoxicologue cantonal, des SIG, du Service de contrôle des pollutions sont également fréquemment alertés. Chaque fois que la situation le demande, les sapeurs du SSA, ou des entreprises chimiques du canton, viennent nous prêter main-forte. Il en va de même de l'hélicoptère de la Sécurité civile, des Samaritains et, plus particulièrement en Ville de Genève, du GIS, des Sauveteurs auxiliaires, de la P.C., des chiens de catastrophes, etc...
Ces alarmes successives nous permettent de régler la quasi-totalité des problèmes de logistique. Lorsque tel n'est pourtant pas le cas nous nous tournons vers nos collègues vaudois ou encore vers ceux de France voisine.
Dans un autre registre, nous devons également prendre soin d'informer, en premier lieu les pouvoirs publics (Autorités politiques, services publics, etc...), puis la population par le canal de la presse, de la radio et de la TV.

D'autres facettes de l'intervention

Derrière toute cette technicité se cachent malheureusement trop souvent des drames. Drames qui semblent frapper aveuglément, parfois avec acharnement. Les sapeurs-pompiers ne restent jamais insensibles au témoignage de la souffrance des autres. Certes, ils cachent parfois leur sensibilité, mais c'est seulement pour mieux venir y puiser, le moment venu, la motivation nécessaire à l'accomplissement de leurs multiples tâches. Ils y trouvent également la volonté de toujours mieux se former, pour pouvoir mieux aider! Car être très souvent le dernier recours de personnes en détresse impose ces contraintes qui doivent être librement acceptées par tous.
Par contre les sapeurs-pompiers sont plus loquaces pour décrire les dénouement heureux auxquels ils assistent et qui parfois ne manquent pas de poésie. Sans oublier les situations cocasses, burlesques, insolites, voire drôles, qui jalonnent notre mémoire collective.

"Ainsi, en fin d'après-midi... il y a quelques années... l'alerte retentit sur le 118. Machinalement le téléphoniste de faction répond:
-Urgence feu!
-Venez vite ma cuisine commence à brûler!

Le téléphoniste calme son interlocuteur visiblement perturbé et obtient les renseignements indispensables pour mettre l'alarme dans la caserne.
Pourtant, au moment de faire son annonce, un doute l'assaille: Le n° de téléphone de l'appelant ne correspond pas au quartier où les secours sont demandés! Il va vérifier. Comme le sinistre s'est déclaré à Meyrin, il a le temps. Malheureusement, personne ne répond plus au téléphone!
Les minutes passent... la tonne arrive sur place... les sapeurs ne constatent rien d'anormal! Le téléphoniste s'apprête à les faire rentrer quand le 118 retentit à nouveau!
-Alors, vous venez?
-Nous sommes sur place, allez vers nos hommes car ils ne trouvent pas votre appartement.
-Vous charriez, quand je les ai entendu arriver, je suis descendu dans la rue. Mais depuis plus rien, il n'y a pas un pompier!
-Vous êtes bien à Meyrin, au...
Un sonore juron répond à la dernière demande au téléphoniste. En fait le quidam exploite bien un petit atelier dans la région de Meyrin, mais il habite à la Servette. Ce jour-là, en rentrant chez lui, accidentellement il boute le feu à sa cuisine. Dans sa précipitation il donne au téléphoniste les coordonnées de son atelier. Seul l'identificateur du n° de téléphone le trahit! Trop tard... et c'est ainsi qu'il a seulement entendu passer les secours qui lui étaient pourtant destinés.
Heureusement pour lui, le début de l'incendie de sa cuisine n'a pas eu de conséquences trop fâcheuses. Ce qui explique, peut-être, l'absence d'autre appels par le voisinage."

Genève, juin 1995 L'officier instructeur du SIS

Plt Francis LE COMTE

Plt Le Comte

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